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et Césarine ne le cèdent point, ce me semble, à Hedda Gabler. — Bref, le théâtre de Dumas, comme celui d’Ibsen, est plein de consciences ou qui cherchent une règle, ou qui, ayant trouvé la règle intérieure, l’opposent à la règle écrite, ou enfin qui secouent toutes les règles, écrites ou non.

Que dis-je ! Les traits même purement septentrionaux ne sont pas absents des drames de notre compatriote. Vous vous rappelez, car les gens frivoles s’en sont assez moqués, que, dans Denise et ailleurs, M. Dumas exige que l’homme arrive au mariage aussi intact qu’il souhaite ordinairement sa fiancée. Et cette égalité des sexes au regard de ce devoir spécial est justement le sujet d’une des comédies de Bjoernson : le Gant. Seulement, chez l’écrivain polaire, c’est une jeune fille qui soutient publiquement cette thèse, devant sa famille, devant des hommes. Et tout de même c’est bizarre, et l’on peut estimer que l’âme de cette courageuse vierge manque un peu de duvet…

Venons aux romanciers russes à Dostoïewski, à Tolstoï. M. de Vogüé nous dit que deux traits les distinguent de nos réalistes à nous :

1º « L’âme flottante des Russes dérive à travers toutes les philosophies et toutes les erreurs ; elle fait une station dans le nihilisme et le pessimisme : un lecteur superficiel pourrait parfois confondre Tolstoï et Flaubert. Mais ce nihilisme n’est jamais accepté sans révolte ; cette âme n’est jamais impé-