Page:Lemaître - Les Contemporains, sér6, 26e mille.djvu/226

Cette page n’a pas encore été corrigée

Tout cela est exprimé dans des vers moins clairs sans doute que des vers de Boileau, mais cependant aussi précis qu’ils le pouvaient être, et où il faut admirer le plus grand effort qu’ait sans doute fait la poésie pour énoncer des conceptions métaphysiques. (Je n’y vois à comparer que certaines pages de Sully-Prudhomme :)

  Dieu dit à la Raison : Je suis celui qui suis ;
  Par moi seul enfanté, de moi-même je vis ;
  Tout nom qui m’est donné me voile ou me profane,
  Mais pour me révéler le monde est diaphane.
 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
  Celui d’où sortit tout contenait tout en soi ;
  Ce monde est mon regard qui se contemple en moi.
 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
  Les formes seulement où son dessein se joue,
  Éternel mouvement de la céleste roue,
  Changent incessamment selon la sainte loi :
  Mais Dieu, qui produit tout, rappelle tout à soi.
  C’est un flux et reflux d’ineffable puissance,
  Où tout emprunte et rend l’inépuisable essence,
  Où tout foyer remonte à ce foyer commun,
  Où l’œuvre et l’ouvrier sont deux et ne sont qu’un,
  Où la force d’en haut, vivant en toute chose,
  Crée, enfante, détruit, compose et décompose ;
  S’admirant sans repos dans tout ce qu’elle a fait,
  Renouvelant toujours son ouvrage parfait ;
 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
  Où la vie et la mort, le temps et la matière,
  Ne sont rien, en effet, que formes de l’esprit ;
 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
  Où Jéhovah s’admire et se diversifie