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Et il conclut :

  Étrange vérité, pénible à concevoir,
  Gênante pour le cœur comme pour la cervelle,
  Que l’Univers, le Tout, soit Dieu sans le savoir !

Que faire donc ? Maintenir un Dieu personnel, afin d’échapper à l’obscurité du panthéisme et aux difficultés qu’on trouve à fonder sur le panthéisme une morale ; mais ne point séparer l’existence de Dieu de celle du monde, afin d’éviter que ce Dieu ne se rétrécisse en une personne humaine ; par suite, regarder le monde comme co-éternel à Dieu, concevoir la création comme continue et toujours actuelle, car elle est pour nous la condition même de l’existence de Dieu ; considérer enfin l’univers et la vie à tous ses degrés, depuis la vie inorganique jusqu’à la pensée humaine, comme un système de signes de plus en plus clairs et conscients et comme la parole même de l’Être divin : parole balbutiante et ignorante chez les créatures inférieures, mais qui, chez l’homme, commence à savoir ce qu’elle dit… À quoi il faut ajouter ce corollaire : — Si Dieu n’existe qu’à la condition d’agir, de créer, en retour les choses n’existent qu’en tant qu’elles signifient Dieu et dans la mesure où elles le signifient ; autrement dit, elles n’existent qu’en tant qu’elles sont pensées par l’homme, puis qu’elles n’ont de sens que dans son cerveau. Et c’est ainsi que, de cette sorte de fusion du déisme et du panthéisme, résulte l’idéalisme pur.