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  Au-dessus de la grotte un lierre enraciné,
  Laissant flotter en bas ses festons et ses nappes,
  Étend comme un rideau ses feuilles et ses grappes,
  Et, se tressant en grille et croisant ses barreaux,
  Sur la fenêtre oblongue épaissit ses réseaux.

Comptez : cela fait cinq verbes et huit substantifs, là où un seul substantif et un seul verbe suffiraient : mais aussi cela donne l’idée d’un rideau de lierre tout à fait sérieux. — Tous les sentiments simples, amour du village et de la maison, tendresse maternelle, piété filiale, amitié pour les bêtes, tristesse du retour dans la maison natale qui a changé de maître, etc… ; et les spectacles les plus généraux de l’univers physique, printemps, hiver, soir, matin, lac, plaine, montagne… ; et les travaux de la vie pastorale et agricole, tout cela y est décrit avec une ampleur, une naïve opulence d’expression, qui trois mille ans après l’Odyssée, et malgré tout ce qu’il a passé d’eau sous les ponts, sent, je ne sais comment, son poète primitif, et fait surtout songer (j’y reviens) aux descriptions de Valmiki et des bons brahmanes. — Tout y est magnifié. Quand on pleure dans Jocelyn (et l’on y pleure souvent), c’est, comme dans les antiques épopées, une pluie, un torrent de pleurs :

  L’ombre de ses cheveux me cachait son visage,
  Mais j’entendais tomber des gouttes sur la page.