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est son vrai chemin. Il prend cela sur lui, ou plutôt il ne fait que transmettre à Jocelyn l’ordre de Dieu :

  Il est dans notre vie une heure de lumière,
  Entre ce monde et l’autre indécise frontière…
  Je suis à cet instant, et je sens dans mon coeur
  Ce verbe du Très-Haut qui parle sans erreur.
  Il me dit d’arracher, d’une main surhumaine,
  Un de ses fils au piège où le monde l’entraîne.
  Je prends sur moi l’arrêt qui de mes lèvres sort.

Et la suite, qui est l’histoire des douleurs, mais aussi de la charité grandissante et, finalement, de la sainteté de Jocelyn, prouve bien que le vieil évêque avait raison et qu’il fut, dans sa violence inspirée, bon aiguilleur de cette destinée hésitante.

— Mais, direz-vous encore, et Laurence ? Si Jocelyn a le droit de s’immoler lui-même, a-t-il le droit d’abandonner cette jeune fille ? Et n’est-ce point la faute de Jocelyn si, plus tard, Laurence tourne mal ? — Je répondrai sans hésitation : — Laurence n’avait qu’à bien tourner. En tournant mal elle justifierait presque la fuite de Jocelyn, si cette fuite avait encore besoin d’être justifiée, et si ce n’était une suffisante excuse à l’abandon d’une jeune fille (d’ailleurs laissée intacte) que le sacrifice total et réel d’une vie à l’humanité.

La douleur pouvait être, pour cette adolescente, un ferment de vertu, — comme elle le devient pour