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— Mais, direz-vous, l’évêque abuse ici de la tendresse de cœur de Jocelyn, et il y a vraiment de l’indiscrétion dans le dernier argument qu’il lui pousse. — Parfaitement. Et après ?

— Mais ce vieillard est bien imprudent. En contraignant Jocelyn, il s’expose à donner à l’Église un prêtre douteux, et qui sera malheureux ou coupable.

— Vous oubliez toujours que cet évêque et ce séminariste sont d’autres croyants que vous ou moi. L’évêque est convaincu qu’il y a, dans le sacrement de l’ordre, une « grâce » qui changera l’âme du nouveau prêtre, qui lui communiquera la force de résister aux tentations et de tenir ses engagements sacerdotaux. Et, même humainement, ce vieux saint ne raisonne point si mal. Ce qu’il veut, c’est mettre entre Laurence et Jocelyn l’irréparable, sachant bien, d’ailleurs, qu’il y a des âmes (et Jocelyn en est une) qui ne lésinent point avec le devoir, qui finissent par chérir celui-là surtout qu’elles n’ont pas choisi librement, car elles le sentent d’autant plus impérieux qu’il exige d’elles un plus grand sacrifice. Il est sûr, le rude apôtre, de servir les desseins de la Providence en imposant à cette âme évidemment élue un acte de charité qui l’engagera à tout jamais dans le ministère de la charité universelle. Il est sûr que Jocelyn se trompait sur lui-même ; d’un geste infaillible, il ramène ce prédestiné dans le chemin du renoncement, qui