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de Dieu. Mais nous sommes ici, j’en ai peur, dans une région de rêve où les mots n’ont plus un sens bien précis… Dire que le monde est la parole de Dieu, ce n’est peut-être déjà plus distinguer nettement l’un de l’autre ; et nous nous demandons, et Lamartine se demande lui-même ce que peut bien être Dieu en dehors de sa parole qui est le monde, et si Dieu serait encore concevable, cette parole supprimée. Le poète nous dit :

  Il est une langue inconnue
  Que parlent les vents dans les airs,

etc., etc. Il énumère ici tous les phénomènes de l’univers physique, et conclut : « — Cette langue parle de toi,

  De toi, Seigneur, être de l’être,
  Vérité, vie, espoir, amour !
  De toi que la nuit veut connaître,
  De toi que demande le jour,
  De toi que chaque son murmure,
  De toi que l’immense nature
  Dévoile et n’a pas défini… »

Autrement dit : « Sans la nature qui est son verbe, et qui exprime, semble-t-il, une volonté aimante et bienfaisante, nous ne saurions rien de Dieu. » Or, de là à songer : « Ce verbe, c’est Dieu, puisque, sans lui, Dieu serait pour nous comme s’il n’était pas », y a-t-il si loin ? — Et, d’autre part, lorsque les poètes