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qu’alors seulement nous avons appris à bien voir l’univers physique et à connaître entièrement combien la terre est belle, douce, mystérieuse et divine. Cet amour de la nature, nous le respirons à présent dès l’enfance, dans les premiers vers que nous épelons ; il fait désormais partie des sentiments essentiels et constitutifs de l’homme moderne ; et je suis tenté de croire que, parmi les causes qui nous ont rendus si différents des hommes d’autrefois, il faut tenir grand compte de celle-là.

Non, sans doute, Lamartine n’est pas le premier en date de nos grands « peintres de la nature ». Mais il est resté, je crois, le plus aisé et le plus large, le plus naïvement ému, le plus spontané. Je trouve souvent, je l’avoue, plus de précision et de force que de grâce dans les descriptions de Rousseau, qui d’ailleurs eut à créer, en partie, le vocabulaire du genre et comme son outillage verbal. Il y a, parfois, bien de la sensiblerie et de l’enfantillage chez Bernardin. Les merveilleux paysages de Chateaubriand sentent volontiers le décor, l’arrangement théâtral. Ces grands artistes font « poser » la nature devant eux ; Lamartine, non. Il ne s’en sépare point : il s’y baigne. C’est que, plus longtemps et plus assidûment que les autres, il a vécu près de la terre d’une vie intimement et profondément agreste.

  Je suis né parmi les pasteurs.
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