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matière à raillerie et qu’on ait dit qu’il s’était marié « par pénitence » (on l’a bien dit de Racine !). Ce fut le mariage d’un idéaliste et d’un chrétien ; mariage non de passion, mais de haute raison, de tendresse et d’estime. On sent, je ne saurais trop dire à quoi, que Julie eût-elle été libre, il n’eût pas épousé Julie. La chanter, à la bonne heure. Il épousa, après d’assez longues fiançailles cachées, une Anglaise du même âge que lui, pas très jolie, — mais avec de beaux yeux pourtant, de beaux cheveux et une belle taille, et qui, enfin, l’adorait. Tous deux se conduisirent avec générosité ; car Maria-Anna Birsch, qui était protestante, abjura en secret pour pouvoir être à son grand homme ; et lui, c’est après la publication des Méditations et quand déjà la gloire lui était venue, soudaine et enivrante, qu’il épousa cette fille médiocrement belle et médiocrement riche. Je veux vous mettre sous les yeux, — et si vous la connaissez déjà, vous en serez quitte pour la relire, — une curieuse lettre de Lamartine à son ami Aymon de Virieu, où il apparaît, — et bien d’autres endroits de sa correspondance nous le confirment, — que ce poète, d’un lyrisme si épandu, n’en eut pas moins une très forte vie intérieure et que son christianisme somptueux ne s’exhalait pas tout en paroles.

« Je te dirai le fin mot, à toi seul : c’est par religion que je veux absolument me marier… Il faut enfin ordonner sévèrement son inutile existence,