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belle personne de son temps », et qu’enfin elle prenait des bains de lait, qu’elle distribuait le lendemain à ses béguines, au réfectoire.

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Ce couvent est au roi plus qu’à Dieu. On n’y enseigne point l’humilité. Les religieuses même l’ignorent. Quand l’archevêque de Paris fait mettre les scellés sur leur bibliothèque (parce qu’elle contient des livres jansénistes), elles les font lever par deux « visiteurs » de leur ordre, et l’archevêque finit par leur faire des excuses.

Ce qu’on développe chez les pensionnaires, c’est l’énergie individuelle, le sentiment de l’honneur ; et on leur apprend aussi l’immolation de soi à l’intérêt d’une caste qui est encore (pour quelques années) une institution politique et sociale. Ce couvent est une sorte d’« École des Cadettes », une école de vie élégante, d’orgueil, de volonté — et de sacrifice. L’enseignement religieux devient souvent, ici, d’un illogisme charmant, l’institution même de la noblesse et jusqu’à ses préjugés d’honneur allant contre l’esprit de l’Évangile.

C’est égal, la vaillance et la fierté de ces fillettes me ravissent. — À huit ans, Mlle de Montmorency « eut un entêtement très fort vis-à-vis de madame l’abbesse (c’était alors Mme de Richelieu), qui lui dit en colère : « Quand je vous vois comme cela, je vous tuerais. » Mlle de Montmorency répondit : « Ce ne serait pas la première fois que les Richelieu auraient