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l’émigration, M. Ernest Daudet nous les décrit dans un bien amusant chapitre. Il a fait, lui aussi, à sa façon (et cette façon est claire, sincère et vivante), ses Rois en exil.

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                                       Paris, 27 décembre 1889.

Ma chère cousine,

J’ai vu récemment Léna, drame tiré d’un roman anglais par un comédien français et par une dame hollandaise, dont l’action se passe dans la banlieue de Londres, à Monaco et en Écosse, et qui est joué par des comédiens dont les uns reviennent d’Amérique, le jeune premier de Pétersbourg et la grande jeune première de partout.

Les journaux vous ont dit que Mme Sarah Bernhardt mourait merveilleusement. C’est vrai. Mme Sarah Bernhardt est, au théâtre, une grande réaliste, j’entends une réaliste qui garde le souci de la beauté. Dans les autres actes, elle est énervante. Elle psalmodie son rôle du ton d’une petite communiante de dix ans qui récite les Voeux. Est-ce habitude de « déblayer » pour des publics qui ne savent point le français ? Je crois plutôt qu’à force d’exprimer des sentiments violents, de mimer les drames sanguinaires de M. Sardou, de jouer les scènes où l’on crie, où l’on se roule par terre, où l’on est torturé, où l’on tue, où l’on se tue, où l’on est tué, Mme S. Bernhardt