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volume intitulé : Coblentz. M. Ernest Daudet n’est certes pas un révolutionnaire ni un démagogue. Or voilà que, sans nul parti pris, ayant plutôt, à l’origine, quelque sympathie en réserve pour les émigrés, ou du moins le désir de les trouver dignes d’intérêt et d’estime, il a, comme malgré lui, écrit sur eux, rien qu’avec des documents émanés d’eux, un livre terrible, écrasant pour leur mémoire, qui est une condamnation définitive et, je crois, sans appel possible.

« Incapacité… présomption… folles tentatives… imprudence criminelle », tels sont les mots qui reviennent sans cesse sous la plume de M. Ernest Daudet. À un moment, après avoir cité une lettre du comte de Provence, il ajoute : « Cette lettre est abominable. Elle résume toutes les haines, tous les préjugés, toutes les exigences des émigrés. » Et ailleurs : « On peut dire que, jusqu’à sa mort, le roi n’eut pas de pire ennemi que les émigrés et qu’ils furent les principaux auteurs de ses maux. »

Tout le livre est la démonstration détaillée de cette phrase. Une vérité en ressort, que l’on soupçonnait sans doute, mais qui n’avait jamais été établie avec cette force : c’est qu’en effet les vrais meurtriers de Louis XVI et de Marie-Antoinette, ce sont les deux frères du roi et ce sont ses bons gentilshommes. « Caïn ! Caïn ! » s’écriait un jour la reine en parlant du comte de Provence.