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pouse pas la fille d’un banquier juif, cela est rare en ce temps-ci, et cela excite presque un étonnement respectueux… Mais si vous saviez jusqu’où sont descendues, au temps où nous vivons, les façons des gentilshommes !

Non seulement, monsieur, les cadeaux offerts à la fiancée sont étalés dans les salons grands ouverts comme dans une boutique foraine, et les folliculaires même et les plus minces grimauds sont invités à les voir, mais la liste de ces objets a été imprimée tout du long dans les gazettes, avec les noms des donateurs, comme pour faire le public juge de leur générosité et exciter par là leur émulation !

Et notez, monsieur, que ceci n’a pu être fait par surprise. L’inventaire est de quatre cents lignes environ et remplit deux colonnes entières de journal. Il faut ou que la noble famille ait pris la peine de le dicter à quelque reporter, ou qu’elle l’ait communiqué elle-même aux feuilles publiques.

N’est-ce pas une grande pitié ?

Passe encore, monsieur, si cette exhibition était magnifique et vraiment digne des grands seigneurs qui prétendent en régaler la foule. Mais quelqu’un qui y est allé voir, ayant « suivi le monde », m’assure que presque tous les objets qui figurent là semblent sortis des mêmes magasins de bimbeloterie. C’est du bon article de Paris. Il y a une demi-douzaine de crayons, autant de buvards, un tire-