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« Qu’est-ce que ce struggleforlifeur ou struggleur for life en carton qui, au moment de faire son coup, se trouble, pâlit, ne se domine plus, crie involontairement comme une femmelette nerveuse, puis s’effondre en demandant pardon d’avoir été méchant ?

« Voici comment j’aurais, moi, conçu la scène.

« Paul Astier apporte le verre d’eau et, très calme, le tend à la duchesse. Elle a compris. Elle prend ce verre et le pose sur la table, mais sans le lâcher. Puis, comme si elle oubliait de boire, elle se met à parler de choses insignifiantes… du monocle d’Herscher ou de la toilette de Mme de Rocanère… Cela, pendant plusieurs minutes. (Plus cela durera, plus l’effet sera grand.) Et, tout en conversant ainsi de l’air le plus tranquille du monde, elle regarde Astier dans les yeux… Il ne bronche pas. Seulement il trouve le temps long et, malgré lui, ses yeux se portent sur le verre… Ah ça ! est-ce que la vieille ne va pas boire à la fin ?

«… Lentement, d’un geste indifférent et en suivant la causerie commencée, la duchesse se décide à approcher le verre de ses lèvres… Rien ! Paul Astier n’a pas bougé…

« Alors elle remet le verre sur la table, se redresse et éclate : — Ah ! misérable ! tu m’aurais laissé boire, n’est-ce pas ? Etc… Je vais appeler, et montrer à tout le monde qui tu es !…

« Mais lui, beau joueur : — Soit !… c’est la cour d’assises.