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son crime, c’est qu’au fond il n’est pas du bon bateau, du vrai bateau, du dernier bateau, celui des petits struggleforlifers de vingt ans. Il n’est que de l’avant-dernier, celui des struggleforlifers de trente à trente-cinq ans.

Elle est amusante, cette vieille image ainsi renouvelée par un homme qui a le génie du pittoresque.

On les voit à la queue leu leu, tout le long du fleuve des âges, ces navires qui portent les générations successives et qui, par leur construction même, leur aspect et leur allure, expriment quelque chose de l’âme et des mœurs des passagers : le bateau d’aujourd’hui, net, lisse, à vapeur, en acier, tout à l’utile, — le haut vaisseau royal, majestueux et lourd, chargé d’ornements et de dorures, — la trirème antique, élégante comme un beau vase et berçant à sa proue une sirène couronnée de fleurs… et ainsi de suite jusqu’à l’arche de Noé, le plus vieux des bateaux et le plus innocent, parce qu’il est celui qui contient le plus de bêtes.

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                                       Paris, 5 novembre.

Hier, dans une maison où j’étais, on parlait de la Lutte pour la vie et l’on discutait la scène du verre empoisonné.

Une femme se mit à dire :