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étudié les albums de Gavarni et qui, surprenant sa mère en faute, lui dit d’un air entendu :

— Hein ! maman, t’en as d’la chance que j’sois pas un enfant terrible !

Celui-là, après tout, je ne vous en garantis pas l’authenticité. Mais, en voici un que j’ai entendu de mes oreilles. Il est de Nicole, la petite sœur de Bob. Elle a huit ans, elle est fort paresseuse et rapporte régulièrement, du couvent où elle est élève externe, des bulletins déplorables. Un jour, sa mère lui faisait honte devant des étrangers de son ignorance, et Nicole protestait. Alors M. l’abbé, l’abbé de Bob, intervint :

Mme Gyp a malheureusement raison, dit-il ; et tenez ! je parie que Mlle Nicole ne répond pas à la question pourtant bien simple que je vais lui poser… Quelles sont les cinq parties du monde ?

Nicole commença : « l’Europe… l’Europe… » Elle finit par trouver l’Amérique ; et puis plus rien. L’abbé ricanait.

— Zut ! dit Nicole exaspérée.

Vous jugez du scandale. On enferma Nicole. Le soir, au dîner (où elle était privée de dessert), elle avait les yeux si rouges et l’air si malheureux que sa mère eut pitié d’elle :

— Vois, ma petite fille, lui dit-elle doucement, comme tu as été méchante…

— Dame ! pourquoi qu’il me laissait pas tranquille ?