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lions. Elle nous est révélée par Théodore de Banville dans ses Occidentales. Le poète nous montre M. de Rothschild, dès l’aurore, mettant ses manches vertes et s’asseyant à son bureau de palissandre :

  Il fait le compte, ô ciel ! de ses deux milliards.
            Cette somme en démence,
  Et, si le malheureux s’est trompé de deux liards,
            Il faut qu’il recommence !

Il y a beaucoup de sens dans cette hyperbole lyrique. Les grandes fortunes étant aujourd’hui dans la banque, les hommes les plus riches ignorent les beaux loisirs, travaillent comme des commis et emploient principalement leurs millions… à en gagner d’autres.

Vous, monsieur, vous avez trouvé un moyen de dépenser avec noblesse les funestes revenus dont vous êtes embarrassé. Le journaliste à qui vous vous êtes confié vous fait dire : «… Chez moi, j’ai partout des tableaux sous les yeux. C’est très bien. Mais, quand je suis dehors ? Je suis ennuyé de ne pas voir d’objets d’art… Eh bien, que voulez-vous ? pour ne pas me condamner à vivre dans une galerie de tableaux, j’ai résolu de me composer un petit musée de statues à travers les rues de Paris. »

Ainsi, monsieur, il vous est réellement impossible de vivre sans voir des « objets d’art », et cela, même