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Orient. Nous avons eu le japonisme, devenu banal à son tour ; nous avons maintenant le javanisme et l’annamisme. Quant aux Peaux-Rouges et aux bons nègres, il y a longtemps qu’ils ne nous gardent plus de surprises. Nous savons à présent, tout en gros, quel est l’aspect extérieur de l’humanité sur les divers points de sa planète. Nous savons à quoi nous en tenir sur la valeur décorative des plus lointaines civilisations jaunes ou noires. Ah ! ma cousine, que c’est donc toujours à peu près la même chose ! Du moment qu’on ne peut pas nous faire voir le costume, l’habitation, l’ameublement et les danses des habitants de la lune, ce n’est vraiment plus la peine de nous déranger.

Je feuilletais, un de ces derniers matins, les relations de voyages du bon Regnard. Ce poète préféré de J.-J. Weiss avait parcouru toute l’Europe jusqu’à la Laponie, et il avait eu la chance d’être « captif en Alger », comme ces personnages mystérieux et bienveillants qui viennent dénouer la moitié des comédies de Molière. Bref, Regnard avait presque autant voyagé que notre suave et triste Pierre Loti. Or, il n’avait rien vu. Voulez-vous savoir ce que lui inspire Alger ? Voici : « Alger est situé sur le penchant d’une colline, que la mer mouille de ses flots du côté du nord. Ses maisons, bâties en amphithéâtre et terminées en terrasses, forment une vue très agréable à ceux qui abordent par mer. » C’est tout ; et, en effet, qu’y a-t-il de plus ?… Eh bien,