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nage. On n’avait osé donner ce rôle à aucun autre écolier, « crainte de mécontenter les parents » (le trait n’est-il pas amusant ?), et l’on m’avait fait comprendre que je devais me sacrifier…

Et le lendemain, à l’école des soeurs, les petites filles jouaient Caroline de Montfort ou la Calomnie confondue et l’innocence reconnue. Un drame joliment touchant, ma cousine ; un drame que j’ai su par cœur et dont je puis encore vous citer le commencement :

« Que je plains cette chère Caroline de Montfort ! que de pleurs elle me fait verser !… Née de parents d’une illustre origine, elle n’était pas destinée à gagner sa vie comme une simple ouvrière. L’immense fortune que M. de Montfort, son père, avait acquise à l’île Bourbon… »

Ici je ne sais plus.

On a supprimé ces divertissements, sous prétexte que les répétitions faisaient perdre du temps aux élèves. C’est une erreur, ma cousine ; on ne répétait qu’après la classe du soir. Et, quand même on eût dérobé quelques heures à la grammaire ou à la géographie, la perte n’était-elle pas heureusement compensée par la petite excitation intellectuelle et par l’humble commencement de plaisir artistique que ces exercices innocents apportaient aux jeunes acteurs ? Et puis, les spectateurs étaient si contents ! Tout le pays était là ; des bonnes femmes pleuraient d’attendrissement. C’est à ces fêtes enfantines que