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                                       Paris, 7 août.

Il va sans dire qu’elle était fort brillante, la soirée d’hier à l’Opéra. Mais je vous le dis en secret, ma cousine, je ne suis pas très sûr que le shah s’y soit amusé. Et je ne crois pas, en effet, qu’une représentation de ce genre soit ce qu’il y a de plus propre à éblouir ou à divertir un monarque d’Orient, un roi Mage.

Comme spectacle, cela doit lui sembler médiocre, car il a mieux chez lui. Il est certain que son palais et ses jardins de Téhéran et la multitude bariolée de ses serviteurs et de ses femmes lui offrent des tableaux beaucoup plus riches et plus éclatants que la salle de l’Opéra, même avec toutes les chandelles allumées et des habits verts d’académiciens dans les loges. L’Orient est, pour nous-mêmes, pour nos poètes et nos peintres, le pays somptueux et pittoresque par excellence. Ce ne sont donc pas nos pauvres « splendeurs » qui peuvent étonner le roi des rois. Ce qui peut lui inspirer pour nous quelque considération, c’est la galerie des Machines, c’est la Tour, ce sont nos usines et, si vous voulez, les magasins du Bon-Marché et du Louvre. Mais ce n’est point l’Opéra.

Le divertissement a dû lui paraître à peu près nul. Sans doute il a pris quelque plaisir aux ballets.