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images qui représentent les « actualités » les plus intéressantes et, régulièrement, le dernier crime ou la dernière exécution capitale. Tout à l’heure encore j’ai vu, pour mes deux sous, la catastrophe de Saint-Étienne, un dîner sur la seconde plate-forme de la tour Eiffel, la fête de la Raison, le crime d’Auteuil, et le général Légitime assiégé dans Haïti !

Enfin (car, vivant beaucoup dans la rue, j’ai suivi de près toute cette évolution) voici les dégustateurs automatiques. Il y en a tout un système fort complet dans la rue Royale. En jetant un décime dans la tirelire et en tenant un verre sous un robinet, on a de la bière, ou du bydof (qui est du bitter russe) ou de la limonade, ou du vin blanc, ou du vin rouge. Tout cela pas trop mauvais ; j’ai goûté de tout. Mais il est certain que cet établissement ressemble aussi peu que possible à un cabaret de Téniers.

On ne s’arrêtera pas en si beau chemin. Il est probable que, dans quelques années, des machines silencieuses mettront entre les mains des passants toutes les choses nécessaires ou utiles à la vie, depuis une tranche de rosbif jusqu’à une paire de chaussettes, sans l’intervention d’aucun marchand, d’aucun commis, d’aucune demoiselle de comptoir.

Ils commencent à m’épouvanter, les progrès de cette civilisation industrielle dont nous goûtons les bienfaits ingénieux. Bientôt tout se fera par des machines, et nous croirons vivre dans un roman de Jules Verne. Ce « panmécanisme » sera commode,