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qui ressemble, inachevée, à une massive forteresse byzantine, jusqu’aux jolies ruelles bordées de jardinets, qu’on découvre sur l’autre versant de la colline. Puis j’avais dîné presque seul, près du moulin, dont le vent faisait craquer la membrure comme celle d’un vieux bateau par le mauvais temps. C’est de là qu’il faut voir la nuit tomber sur Paris et s’allumer peu à peu les traînées d’illuminations. Mais cette année la pluie m’a effrayé et, après quelques oscillations, j’ai fini par me trouver assis dans un coin paisible et élégant, mais par suite peu intéressant ce jour-là, d’un restaurant des Champs-Élysées.

Secondement, j’aurais voulu voir le feu d’artifice. Pourquoi pas ? Je n’en ai point vu depuis ma petite enfance, sinon partiellement et de très loin. Je rêvais d’en voir un sérieusement, d’aussi près que possible, et du commencement jusqu’à la fin. Mais pour cela j’aurais été obligé d’attendre longtemps, debout, dans la foule. J’y ai renoncé. C’est toujours ainsi. Il faut, pour prendre sa part des divertissements populaires, une force d’âme que je n’ai pas. La foule est admirable de douceur et de résignation gaie. Elle passe des journées dans une attente et dans une immobilité fatigante pour un plaisir d’une demi-heure. Ses joies (comme la plupart de ses travaux) impliquent un don d’extraordinaire patience…

N’ayant donc pas les vertus qu’il faut pour bien voir un feu d’artifice, j’ai repris mon long vagabondage à travers les rues. Un attrait mystérieux m’a