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grandes dames jouaient leur rôle. Aujourd’hui, une fête à la cour, ce n’est qu’une garden-party dans le petit parc bourgeois de l’Élysée. M. Dumas ni M. Sardou n’écrivent pas de ballets pour M. Carnot et ses « courtisans ». Rien qui rappelle Mélicerte ou l’Île des plaisirs. On ne voit point M. Carnot, costumé en Neptune, danser un pas, puis chanter, comme au premier intermède des Amants magnifiques, des vers dans le goût de ceux-ci :

  Le ciel, entre les dieux les plus considérés,
  Me donne pour partage un rang considérable,

ni le général Brugère, costumé en Éole, et l’excellent colonel Lichtenstein, déguisé en Triton, reprendre en chœur :

          Redoublons nos concerts
  Et faisons retentir dans le vague des airs
          Notre réjouissance.

Je vous assure, ma cousine, que je constate sans amertume ces petites différences. Car le spectacle était charmant, hier, dans le jardin du président. Il faudrait la phrase papillotante d’Alphonse Daudet pour vous dire les taches claires des toilettes dans les allées tournantes, sous les grands vieux arbres et, sur la molle descente de la pelouse vers un petit étang à canards, la gaieté des tentes rayées de rouge, d’où les musiques s’envolent par bouffées ; et, çà et