Page:Lemaître - Les Contemporains, sér5, 1898.djvu/239

Cette page n’a pas encore été corrigée

avait obstinément refusé un « parti avantageux », a dû dire à ses parents : « J’ai réfléchi, je ferai ce que vous voudrez. » Ses parents n’y ont rien compris ; mais je connais, moi, son secret. Celui qu’elle aimait n’est plus, car elle aimait Mounet barbu ; et Mounet rasé, ce n’est plus Mounet…

      *       *       *       *       *
                                       Paris, 27 juin.

Vous me demandez, à propos du Disciple, si je connais Paul Bourget. Mais oui, ma cousine, je le vois assez souvent et je l’aime beaucoup. — Et comment est-il ? — À peu près le contraire de ce que le public veut qu’il soit. Parce que Bourget s’est quelquefois occupé des femmes, et parce que, les « passions de l’amour » ne pouvant avoir tout leur développement que dans un monde oisif et riche, il s’est plu, dit-on, à nous décrire les élégances extérieures de ce monde-là, beaucoup se représentent l’auteur de Cruelle Énigme sous les espèces d’un délicieux jeune homme paré, coquet, affecté, efféminé et languide…

Eh bien ! ce n’est pas ça du tout, ma cousine, — mais, là, pas du tout !

Je vous le dis, parce que je le sais : il n’est pas d’esprit plus sérieux ni plus mâle que Bourget. Cet efféminé travaille dix ou douze heures par jour. Ce dandy a une conscience et des préoccupations de