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statues ou bustes de l’empereur, portraits de ses maréchaux, drapeaux français de la Révolution ou du premier Empire… Et alors, on a beau savoir que la guerre est impie, absurde, abominable ; que les armées permanentes volent chaque année, aux peuples d’Occident, une somme incalculable de travail et de richesse, et que ce palais où l’on se promène est proprement le temple du Meurtre et de la Destruction ; on a beau se dire tout cela : comme, après tout, les peuples se battent depuis quelque dix mille ans — et peut-être parce qu’on sent confusément que la guerre est ce qui donne à l’énergie humaine et au courage, père des autres vertus, leur plein développement — on est ému jusqu’aux entrailles, un petit souffle froid vous passe dans les cheveux… et tenez, par exemple, ce guidon de la garde impériale, où sont inscrits les noms de toutes les capitales de l’Europe, ce carré de soie pâlie fait un plaisir à regarder, mais un plaisir !… Et l’on redescend, ayant mangé du tambour et bu de la cymbale, comme disait la vieille chanson des Mystères d’Éleusis.

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                                       Paris, 25 juin.

C’est presque toujours une chose infiniment mélancolique, ma cousine, qu’une « représentation à bénéfice ». Les camarades qui ont été obligés de pro-