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gements à vue aussi instantanés que ceux des théâtres de féeries. Quand je suis parti, grand soleil, toilettes claires, voitures découvertes ; partout une joie, un étincellement. En une minute, le ciel s’assombrit, la pluie tombe ; en une demi-minute, les capotes des voitures s’abaissent, les toilettes roses et blanches disparaissent sous des caoutchoucs sombres, et, des deux côtés de l’avenue, depuis la place de la Concorde jusqu’à l’entrée du Bois, on ne voit qu’une toiture ininterrompue de milliers et de milliers de parapluies. Puis, le soleil revient, et crac ! plus de capotes, plus de caoutchoucs, plus de parapluies : et revoilà les femmes pareilles à des fleurs… L’exécution de ce double mouvement d’ensemble a été étourdissante de rapidité, je dirais presque de précision, — et cela sur une longueur de six ou huit kilomètres.

Une double foule, comme toujours : celle des regardés et celle des regardants. Il y avait des gens (combien ? je ne sais ; peut-être cinquante mille) qui étaient assis, à une heure, sur les trottoirs des Champs-Élysées, de l’avenue du Bois et de l’avenue des Acacias, qui y étaient encore à six heures, et qui, pendant tout ce temps-là, ont regardé passer des voitures. C’est incroyable, ce que l’homme peut déployer de courage, de patience et de résignation… pour s’amuser !

Et que dites-vous du cheval vainqueur ? Un cheval qui s’appelle Vasistas (un nom de domestique de