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bliés cette fois, et vous savez que le printemps, quand d’aventure il y en a un, est charmant à Paris. La végétation y est en avance de huit jours sur celle des bords de la Loire, je l’ai souvent constaté. Joignez qu’il y a beaucoup plus d’arbres sur nos boulevards qu’à la campagne. Et nous avons le bois de Boulogne, où je sais des coins exquis, même un cimetière rustique, l’ancien cimetière de Boulogne, touffu et désordonné comme une petite forêt vierge, et qui ressemble à un cimetière de lakiste. Et je ne parle pas du noble et glorieux paysage des Champs-Élysées, le soir, quand le ciel est d’or derrière l’Arc de Triomphe.

L’autre printemps, l’autre éclosion vivante est au Champ de Mars. Car ç’a été, dans ces derniers temps, comme une poussée et comme un épanouissement rapide et vertigineux des merveilles du travail humain. La tour Eiffel, tant calomniée à l’origine, condamnée par des membres de l’Institut au nom du spiritualisme et de la croyance à l’immortalité de l’âme, n’a eu qu’à grandir pour faire taire ses illustres blasphémateurs. À mesure qu’elle montait, elle devenait belle ; et comment ne l’aurait-elle pas été, puisque la forme et les proportions en étaient commandées par des lois nécessaires et éternelles ? Et la galerie des machines, égale en majesté aux cathédrales gothiques (car elle réalise absolument l’autre type extrême de la beauté architecturale) ! Et les squares et les jardins, surgis, on le dirait, dans l’es-