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la brutalité voulue ni la puérile férocité de ses élèves. La pièce est triste, mais l’observation y est autrement équitable que dans les pessimisteries (si j’ose risquer ce vocable) du Théâtre-Libre. Songez que dans les Corbeaux, sur treize personnages il y en a sept qui sont « sympathiques ». C’est là une jolie proportion ; et plût au ciel qu’elle fût la même dans la vie réelle ! La petite Marie Vigneron est un type de jeune fille tout à fait admirable. Enfin, si le second acte est forcément un peu aride, le premier est un très cordial tableau d’intérieur bourgeois, et le quatrième contient des scènes d’une émotion poignante. Le public a trouvé, il y a sept ans, que quatre femmes en noir, toujours en scène, pendant trois actes entiers, avec des hommes d’affaires et des hommes de loi pareillement en noir, cela faisait beaucoup de noir. Peut-être en prendrait-il son parti, maintenant qu’il sait et qu’on lui a dit sur tous les tons que la pièce était originale et belle. J’aimerais beaucoup revoir une reprise des Corbeaux.

Tandis que je m’attendrissais sur les petites Vigneron, je songeais à toutes leurs sœurs de misère, à toutes les pianistes et institutrices sans emploi qui pullulent sur le pavé de Paris. Et je me suis rappelé un petit fait, terriblement éloquent, dont j’ai été presque témoin et qu’il faut que je vous conte :

Dernièrement une dame de ma connaissance, qui a une petite fille de santé chétive et trop délicate pour suivre des cours au dehors, fait mettre cet avis dans