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que fort peu de sympathie, même intellectuelle, aux sentiments que nous inspirait le nouvel Empereur. On disait qu’il n’avait pas été un fils tendre ; qu’il aimait la guerre pour elle-même ; que son idéal de vie ne dépassait point celui des chefs militaires du haut moyen âge, et que nous devions nous féliciter que le chancelier fût là pour le contenir. Il ne cachait point sa haine de la France et des choses françaises ; il proscrivait de sa table les mets et les vins de notre pays et pourchassait notre langue jusque dans les menus de ses dîners. Il lui est encore arrivé ces jours-ci, ayant des Français pour hôtes, de porter un toast où il célébrait Waterloo et glorifiait Blücher. Il est évidemment très nerveux, sensible à l’excès ; il a des impressions rapides et vives, auxquelles il ne sait pas toujours résister.

Mais cette impressionnabilité ne paraît pas exclure chez lui la ténacité, les desseins opiniâtres. Il est incontestablement original. Il force l’attention. Depuis qu’il est sur le trône, nous nous sommes plus passionnément occupés de lui que de nos cabotins les plus illustres. Ce jeune Empereur a déjà fait un certain nombre de choses extrêmement curieuses.

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Il a commencé par aller visiter, à la file, ses cousins les empereurs et les rois (jusqu’au Grand Turc, qui n’y a rien compris), comme s’il sentait qu’au temps où nous sommes, les souverains que la