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mises à les imiter, par divertissement. Je m’étais laissé dire, quand j’habitais Alger, que, pour former les moukères à cette danse éminemment significative, on était obligé de les prendre toutes petites, et qu’elles piochaient ferme, et que ces exercices déterminaient souvent, chez les jeunes sujets, des désordres intestinaux, si j’ose m’exprimer ainsi. Les moukères de Paris sont plus résistantes. Telle petite cabotine est arrivée du premier coup à reproduire sans douleur ces trémoussements redoutables et se taille ainsi de jolis succès après souper, entre intimes.

Ainsi la danse d’Orient nous envahit, et c’est pourquoi je ne crains pas de jeter ici le cri d’alarme, non en moraliste (je sens trop mon indignité), mais en brave Occidental et en honnête Arya que je suis.

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Cette invasion, si elle se poursuivait, serait déplorable. Notre danse est si supérieure à celle-là par la grâce, par l’esprit, par la décence !

La danse de chez nous et celle de là-bas expriment bien réellement deux âmes différentes et même contraires, deux races, deux civilisations.

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La danse d’Orient est, par essence, un solo et un spectacle.

La femme danse seule et ne danse pas pour son plaisir. Elle n’est que l’esclave obéissante dont la tâche est de réveiller les désirs du maître. Sa danse n’est qu’une série d’attitudes lascives. Ce qu’elle tra-