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tout à fait sec et affligeant à ces tendres coeurs.

À la vérité, ces novateurs ont découvert que l’âme avait son prix et qu’il faut avoir pitié des humbles et des souffrants. Or, je puis leur affirmer que cela même, avec quelques autres choses, est dans les ouvrages de M. Renan, et notamment dans l’Avenir de la Science.

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Car, s’il est un livre de foi, c’est bien celui-là. Je ne pense pas que personne, dans aucun temps, ait pris plus sérieusement la vie que ce petit Breton de vingt-cinq ans dont l’enfance avait été si pure, l’adolescence si grave et si studieuse, et qui, au sortir du plus tragique drame de conscience, seul dans sa petite chambre de savant pauvre, continuait à s’interroger sur le sens de l’univers, — et cela, dans un tel détachement des vanités humaines, que ces pensées devaient rester quarante ans inédites par la volonté de leur auteur.

M. Renan, dans sa préface, « ne réclame pour ces pages qu’un mérite, celui de montrer dans son naturel, atteint d’une forte encéphalite, un jeune homme vivant uniquement dans sa tête et croyant frénétiquement à la vérité ». Ah ! certes, elles l’ont, ce mérite, et abondamment ! Il y a là de l’excès, de l’ivresse cérébrale, une poussée désordonnée de sève intellectuelle. Et il y a de l’enthousiasme. Oui, c’est bien, avec une science plus vive et une plus large intelligence des choses, l’état d’esprit de certains phi-