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glaireuse ? Eh bien, c’est tout de même un sacré bonhomme, et je le trouve très crâne, et je lui tire mon chapeau, car il se fichait de tout, il avait un dessin du tonnerre de Dieu, qu’il a fait avaler de force aux idiots qui croient aujourd’hui le comprendre. Après ça, entends-tu ? ils ne sont que deux, Delacroix et Courbet. Le reste, c’est de la fripouille. » Je ramasse ces perles sans les choisir. Le ton de la conversation est, dans l’Oeuvre, sensiblement le même que dans l’Assommoir. Et tous ces sauvages qui parlent de conquérir, d’avaler Paris ont, avec leurs façons de rouliers, des trésors inouïs de candeur. D’où sortent-ils ? Où M. Zola les a-t-il rencontrés ? Je le préviens que ce n’est plus cela du tout, les peintres d’à présent. Son roman est d’un homme qui n’a pas mis les pieds dans un atelier depuis quinze ans. C’était ainsi autrefois ? À la bonne heure. M. Zola ressuscite les hommes des anciens temps. Il fait presque des « romans historiques » — tout comme Walter Scott, ô honte !

Ainsi l’observation directe et récente des milieux fait évidemment défaut dans l’Oeuvre. Vous pensez bien que vous n’y trouverez pas davantage l’observation des mouvements de l’âme, l’odieuse psychologie. Pourtant la souffrance d’un artiste inégal à son rêve, la souffrance d’une femme intelligente et tendre qui sent que son compagnon lui devient étranger, que quelque chose le lui prend, ce divorce lent de deux êtres qui s’aimaient et qui n’ont rien, du reste, à se