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nouveaux ; qu’il a fait Jocelyn, cette épopée du sacrifice et le seul grand poème moderne que nous ayons ; que nul n’a exprimé comme lui la conception idéaliste de l’univers et de la destinée, et qu’enfin c’est dans Harold, dans Jocelyn et dans la Chute d’un Ange que se trouvent les plus beaux morceaux de poésie philosophique qui aient été écrits dans notre langue ?

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Mais ce grand poète concevait quelque chose de plus grand que d’écrire des vers, et c’est pour cela peut-être que les siens sont beaux d’une beauté unique. C’est dans sa vie même qu’il voulait mettre toute poésie et toute grandeur. Il s’en va, comme un roi qui parcourt ses domaines, visiter l’Orient mystérieux, ce berceau des races. Il siège « au plafond » de la Chambre des députés, ce qui ne l’empêche pas d’être un politique très clairvoyant et très informé, en même temps qu’un merveilleux orateur. Il écrit l’Histoire des Girondins, renverse un trône, gouverne la France pendant quatre mois — puis rentre dans l’ombre.

Non, je ne sais rien de plus magnifique, de plus héroïque, de plus digne d’être vécu que ces quatre mois de Lamartine au pouvoir. Chose invraisemblable et que nous ne concevions plus que dans les républiques antiques, il règne réellement par la