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tiste qui joue au Cirque « le malheureux général Mélas » jusqu’au sergent de ville Champion, ancien gendarme des colonies ; et le paysagiste Crescent, et son excellente femme la mère aux bêtes, et tant d’autres ! — Dans Soeur Philomène, la petite Céline ; dans Germinie Lacerteux, la monstrueuse mère Jupillon et son digne fils ; dans Madame Gervaisais, la mystique comtesse Lomanossow et le terrible père Sibilla ; dans Renée Mauperin, l’abbé Blampoix, confesseur des salons et directeur des consciences bien nées ; Henri Mauperin, le jeune homme sérieux et pratique, économiste et doctrinaire à vingt ans, « médiocre avec éclat et ténacité » (une des plus remarquables études de MM. de Goncourt, et de celles qui ont le plus de portée) ; et ce charmant Denoisel, à qui MM. de Goncourt ont évidemment prêté beaucoup d’eux-mêmes, comme à Charles et à Coriolis ; et M. et Mme Mauperin, et les Bourjot, et tout le monde enfin !…

Car si MM. de Goncourt ont la plume trop inquiète, trop prompte aux soubresauts, trop dédaigneuse des transitions pour nous présenter avec suite l’évolution d’un caractère, du moins ils excellent dans les portraits. Ils y mettent non seulement toute l’acuité de leur observation et tout le relief de leur style, mais encore (étant à cent lieues de l’impassibilité de Flaubert) une rage de verve, beaucoup d’esprit, et un esprit agité qui insiste, qui redouble, qui s’amuse, qui jouit de lui-même. Renée Mauperin est un livre