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mans de M. Octave Feuillet ! Toute la littérature contemporaine est inquiète et malade.

C’est partout, sous des formes diverses, une recherche du rare, du raffiné, du brutal ou du poignant. Nulle joie, nulle sérénité. Ceux qui cultivent encore la fiction l’aiment perverse et troublante et ne sont peut-être pas les mieux portants. Les autres ont donné dans le réalisme, soit en haine du « bourgeois » et par amour du style plastique (comme Flaubert), soit par une morosité naturelle qui se complaît dans les laideurs et dans les brutalités (comme M. Zola), soit par la passion du moderne (comme MM. de Goncourt). — On dit que ces écrivains se sont trompés, qu’ils ont plié l’art à nous donner une impression des choses fort différente de celle qu’on avait coutume de lui demander, qu’ils ont ainsi dépensé un art infini à aller contre le but même de l’art. Je n’en sais rien. S’ils sont malades, c’est avec une bonne partie de leur génération. Malgré tout, nous ne haïssons point ces livres qui nous offrent tant de sensations emmagasinées et tant d’humanité toute vive et toute proche de nous.


II

Ce qui distingue MM. de Goncourt des autres romanciers de la même famille, c’est qu’ils sont les plus impressionnables et les plus tourmentés. Ils n’ont ja-