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La Petite Comtesse, Julia de Trécoeur, Monsieur de Camors sont, à mon avis, les trois romans de M. Feuillet où cet animal est le plus bizarre et le plus « alliciant », dirait M. Paul Bourget. — La petite comtesse de Palme s’éprend d’un jeune homme mélancolique et austère qui l’a brutalisée. Elle le provoque, le harcèle, le supplie enfin de la sauver en l’épousant. À peine a-t-il refusé qu’elle se donne désespérément à un autre (pourquoi ?) et s’en vient mourir chez celui qu’elle aime. — Julia de Trécoeur aime le second mari de sa mère. Après avoir traversé la période de la haine amoureuse et celle de la coquetterie incohérente (voir plus haut), elle s’offre à lui, hardiment, et, repoussée, se jette à cheval dans la mer du haut de la falaise. (La vision de ce suicide équestre est, soit dit en passant, une très belle chose.) — Mlle Charlotte de Luc d’Estrelles, orpheline pauvre, s’est offerte un jour sans succès à son cousin Louis de Camors ; peu après, elle épouse pour sa fortune le général de Campvallon, puis ressaisit son beau cousin, l’oblige à se marier pour détourner les soupçons de son vieux mari, continue d’être à lui, est surprise une nuit par le général qui tombe foudroyé du coup, reprend et garde son amant épouvanté et qui ne l’aime plus, et tout cela sans l’ombre d’un remords. — Certes ce sont là, Bathilde, Julia et Charlotte, trois grandes amoureuses : elles aiment absolument, elles aiment furieusement. Mais quand on a dit cela, on a tout dit. Il est remarquable que Julia