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terres. Il s’occupe d’agronomie, passe ses vacances dans ses domaines, les parcourt en guêtres et en habit de chasse, cause avec les paysans, s’intéresse à leur sort, va voir l’instituteur, offre aux élèves de l’école primaire des livrets de caisse d’épargne, préside dans son canton les comices agricoles, gémit sur la désertion des campagnes et se plaint que l’agriculture manque de bras. C’est ce propriétaire rural et cet économiste éclairé qui a écrit une partie des romans de M. de Glouvet. C’est lui qui nous démontre, dans l’Étude Chandoux et dans la Famille Bourgeois, non point sèchement, mais avec quelque chose du sentiment et de la poésie de Virgile au troisième livre des Géorgiques, combien il est funeste aux familles rurales de quitter les champs pour la ville, la richesse solide et la paix de leur vie campagnarde pour les emplois de la bourgeoisie ou pour l’oisiveté vaniteuse.

La fermière Rose Chandoux vend sa ferme, s’installe en ville, veut que son fils soit notaire. Elle le met au collège, où le lourdaud n’apprend rien. On lui achète tout de même une étude ; on compte sur un beau mariage pour la payer. Tous les mariages manquent. Chandoux s’enfonce, Chandoux tripote, s’associe avec un homme d’affaires qui n’est qu’un coquin, mange la grenouille, est arrêté… Ses parents se sont ruinés pour lui, et sa sœur, à cause de lui, n’a pu épouser un brave garçon qui l’aime. Morale : si Rose Chandoux avait gardé sa ferme, son fils serait riche et n’irait pas en prison.