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c’est bien le même monde qu’il a décrit (dans une disposition d’esprit différente), ou si par hasard il n’a pas eu un autre monde sous les yeux. Car il n’est plus, le monde du XVIIe siècle, ni celui du XVIIIe, ni celui même de la Restauration et du gouvernement de Juillet. Tous ces mondes, quoique très divers entre eux, avaient cependant des rites communs, un ensemble de préjugés et de conventions, une tenue extérieure, une hypocrisie bienfaisante, une commode exagération de politesse… Tout cela a été fort entamé depuis trente ans. Le monde n’a su défendre ni ses frontières ni ses traditions. L’homme qui grondait tout à l’heure avait tort ; car le monde est très suffisamment ouvert et assez bon enfant ; il n’a plus rien de mystérieux ni d’inaccessible. Voyons-le tel que nous le découvre M. Rabusson.

Ce monde est tout simplement le monde qui s’amuse, que l’on peut voir aux premières représentations, aux courses, au cirque, au Bois, et qu’il n’est pas très difficile de côtoyer ou même de traverser par-ci par-là. Il se compose d’un peu de tout : de vieille noblesse, de noblesse récente, de noblesse achetée, de haute bourgeoisie, d’étrangers riches et d’hommes de Bourse. M. de Trièves, dans l’Aventure de Mlle de Saint-Alais, le définit, ce semble, merveilleusement :

Voyez-vous, le monde n’a sa raison d’être qu’avec le luxe et par le luxe ; c’est une association pour le plaisir, ou ce n’est rien. Et il en a toujours été ainsi, quoi qu’on