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la pensée jusqu’à la moelle de la terre, repasser en son sein les six jours de la création, s’épandre avec délices dans le Grand Tout, dépouiller entièrement tout ce qu’on a d’humain et finir cette haute contemplation… (avec un geste) je n’ose dire comment.

Et c’est ainsi qu’a fini M. Armand Silvestre. Le poète des Vestales s’est mis à conter des contes de corps de garde ; l’adorateur mystique de « Rosa la prêtresse » s’est tourné vers Rosa la Rosse ; et les « paysages » où il se plaît n’ont plus rien de « métaphysique ». Et l’historiette grivoise ne lui a point suffi : il l’a voulue incongrue et mal odorante.

Jean-Jacques raconte que, tout enfant, il allait se poster, à la promenade, sur le passage des femmes, et que là il trouvait un plaisir obscur, mais très vif, à mettre bas ses chausses. « Ce que je montrais, ajoute-t-il, ce n’était pas le côté honteux, c’était le côté ridicule. » C’est ce dernier côté qu’étale M. Armand Silvestre avec une complaisance jamais lasse et une joie jamais ralentie. C’est le champ circulaire où il s’est délicieusement confiné. L’ampleur charnue de l’ordinaire interlocuteur de M. Purgon, l’instrument des matassins de Molière, les bruits malséants qui, d’après Flaubert, « faisaient pâlir les pontifes d’Égypte », inspirent à M. Silvestre des gaietés hebdomadaires et bien surprenantes. Ce rêveur est amoureux d’une autre lune que les romantiques. Ce poète lyrique « n’a pas accoutumé de parler à des visages ».

D’autres conteurs nous font des récits légers, vo-