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stitue à l’inspiration un art plus conscient et moins spontané.

C’est ainsi qu’à la mélancolie diffuse des Méditations succède la tristesse analytique de la Vie intérieure ; à l’amour selon Musset, l’amour selon Baudelaire ; à la métaphysique rudimentaire de Victor Hugo, la criticisme de Sully Prudhomme et le nihilisme de Leconte de Lisle. Et c’est ainsi surtout que le pittoresque romantique va se précisant dans les Poèmes antiques et les Poèmes barbares et, puisque j’ai à parler de lui, dans les sonnets de José-Maria de Heredia. On l’a souvent remarqué : la littérature a été prise, un peu après 1850, d’un grand désir d’exactitude et de vérité, et les poètes parnassiens obéissaient, sans s’en douter, au même sentiment que Dumas fils dans ses premières pièces, Flaubert dans son premier roman, Taine dans ses premières études critiques.

Mais le souci de perfection et le besoin de beauté qui hantaient les Parnassiens devaient, au moins dans les commencements (car toute école nouvelle est intransigeante), les conduire à préférer la poésie impersonnelle, presque uniquement descriptive et plastique, celle qui demande ses tableaux à l’histoire et à la légende ou qui reproduit les symboles par lesquels l’humanité passée s’est représenté l’univers. Cette poésie est, en effet, la seule où la forme soit vraiment tout, où l’on soit sûr, si on est séduit, de ne pas céder à un autre attrait que celui des belles images évoquées par des mots harmonieux. Les