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ont l’air. Ils sont à part ; ils sont, comme ils s’appellent eux-mêmes, les « hommes de Dieu ». L’ensemble d’idées et de sentiments que suppose leur profession agit toujours en eux, fût-ce à leur insu ; c’est un élément secret dont il faut toujours tenir compte dans l’appréciation de leurs actes, car il y est toujours présent, même quand ils agissent en apparence comme les autres hommes. Personne assurément n’a mieux démêlé ce mystère que M. Ferdinand Fabre.


VI

Et voilà pourquoi il a su exposer et développer, avec lucidité et avec grandeur, le cas très original d’un prêtre qui n’a pas l’esprit ecclésiastique (Lucifer). L’abbé Jourfier, fils de parlementaire et petit-fils de conventionnel, que ses confrères ont un jour appelé Lucifer à cause de son orgueil laïque et du souci purement humain qu’il prend de sa dignité, est entré dans les ordres avec une grande foi et un grand courage, mais sans avoir senti toutefois cette illumination et cette douceur intérieure qui est le signe de la vocation. Le libéralisme qu’il tient de ses origines le fait gallican et ennemi des ordres religieux. Après une longue lutte contre les moines et contre un évêque qui les soutient par peur, il est lui-même porté à l’épiscopat par la révolution de 1848. Un voyage à Rome lui démontre brutalement qu’il n’y a plus de