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C’est ce que M. Ferdinand Fabre a nettement vu et ce qu’il a fait très fortement sentir dans son Abbé Tigrane. Que cette ambition, que j’ai tenté de définir, rencontre un tempérament violent et colérique, et vous aurez Rufin Capdepont. On a dit que sa passion du pouvoir n’avait guère les allures d’une passion ecclésiastique ; qu’elle était trop fougueuse, imprudente et emportée ; qu’il n’est pas vraisemblable qu’un vicaire général laisse dehors, la nuit, devant la porte fermée de la cathédrale, sous le vent et la pluie, le cercueil d’un évêque : l’esprit de corps est si puissant dans le clergé qu’il est infiniment rare que les haines particulières s’y manifestent par des actes capables de compromettre le clergé tout entier, de scandaliser les fidèles et de réjouir les impies ; et comme ici la publicité de la vengeance s’aggrave d’une sorte de sacrilège, on peut hardiment contester la vérité de cet épisode si lugubrement dramatique. Il se peut qu’on ait raison sur ce dernier point ; mais, au reste, l’impétuosité de Rufin n’exclut point l’habileté. Puis il n’y a pas seulement, dans l’Église, des doux et des patients ; Grégoire VII ni Jules II n’ont laissé une réputation de mansuétude, et, de nos jours encore, on a vu des hommes d’Église au nom desquels on avait pris l’habitude d’accoler le mot « fougueux » comme une épithète homérique. Et, quand Rufin serait dans le clergé une figure d’exception, je ne vois pas en quoi il serait moins intéressant.

Il est bien d’un prêtre, en tout cas, ce revirement