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la vie de Démétrius de Phalère ! — Vous souvenez-vous de ce qu’on trouve au fond du portefeuille de Bixiou[1], le vieux caricaturiste aveugle, le funèbre et féroce blagueur : « Cheveux de Céline coupés le 13 mai ? » — Revoyez-vous dans la Dernière classe[2] le vieux Hauser, avec son vieil abécédaire rongé aux bords et épelant à travers ses grosses lunettes ba, be, bi, bo, bu ? — Je m’arrête : tous les Contes y passeraient ; car il n’en est point qui ne renferme de ces traits inoubliables. Je ne parlerai plus que des Vieux[3], ce fin chef-d’œuvre. Vous rappelez-vous ? « Une lettre, père Azan ? — Oui, monsieur… ; ça vient de Paris. Il était tout fier que ça vînt de Paris, ce brave père Azan. » Puis c’est la place d’Eyguières à deux heures de l’après-midi, la maison des vieux, le corridor… « Alors saint Irénée s’écria : Je suis le froment du Seigneur. Il faut que je sois moulu par la dent de ces animaux. » Cette phrase vous fait revoir, n’est-ce pas ? toute la scène : les deux vieux, les deux petites bleues, la cage aux serins, les mouches au plafond, la grosse horloge, dormant à qui mieux mieux. Elle est étonnante, elle est merveilleuse, ânonnée dans ce moment et dans ce milieu, cette phrase de la Vie des Saints, cette farouche évocation de la grande histoire du christianisme primitif entre Mamette et ses canaris… Et cette phrase, je suis sûr que ce n’est pas le petit

  1. Lettres de mon moulin.
  2. Contes du lundi.
  3. Lettres de mon moulin.