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tout ordinaires et qui nous auraient sans doute faiblement frappés ; il a, si j’ose dire, un merveilleux flair des petits drames obscurs dont fourmille la réalité.

Je ne citerai pas les contes les plus connus, les plus brillants, les plus populaires, mais quelques-uns des plus unis et des plus simplement vrais. Vous rappelez-vous les Deux auberges[1], l’une neuve, bruyante et bien achalandée, l’autre déserte et misérable ; et la maîtresse de cette pauvre bicoque pleurant toute seule et perdant la tête, quand par hasard un client entre chez elle, tandis que son mari chante et boit dans l’auberge d’en face chez la belle Arlésienne.

Entendez-vous ? me dit-elle tout bas, c’est mon mari… N’est-ce pas qu’il chante bien ?… Qu’est-ce que vous voulez, monsieur ? Les hommes sont comme ça, ils n’aiment pas à voir pleurer ; et moi, je pleure toujours depuis la mort des petites…

Une histoire bien simple que le Père Achille[2] ! Le vieil ouvrier a eu un fils d’une maîtresse, avant son mariage. Ce fils, devenu grand garçon, vient voir son père, « seulement pour le voir, pour le connaître. C’est vrai, ça m’a toujours un peu taquiné de ne pas connaître mon père. — Sans doute, sans doute ; vous avez bien fait, mon garçon, » dit le père Achille. Ils vont prendre un litre chez le marchand de vin.

  1. Lettres de mon moulin.
  2. Études et paysages (à la suite de Robert Helmont).