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même dans les grands hommes[1]. » Mais ici les « petits côtés » sont aussi bien chez Corneille que chez Racine. C’est le vieux poète qui avait commencé, à ce qu’il semble. On dira que Racine devait tenir compte de la vieillesse de Corneille ; mais pourquoi Corneille ne tenait-il point compte de la jeunesse de Racine ?

Racine n’a qu’un mot très froid sur la mort de la Champmeslé ; mais il était alors marié, père de famille, déjà vieux. La Champmeslé était pour lui « une ancienne », très ancienne. Et qui dira s’il n’en a pas senti et pensé plus long qu’il n’en a écrit ? Nous savons d’ailleurs à peu près ce qu’avait été la Champmeslé. Si l’on s’indigne que sa mort n’ait pas plus troublé l’un des « six amants contents et non jaloux » que lui prête l’épigramme de Boileau, songeons qu’en revanche Racine avait l’air « à demi trépassé » à l’enterrement de la Du Parc. Et qu’avons-nous à nous mêler de ces affaires de cœur, sur lesquelles les lumières nous font presque absolument défaut ?

Racine fait prendre le voile à quatre de ses filles. « Au temps de Louis XIV et de Bossuet, les parents n’égorgeaient plus leurs filles sur un autel ; ils les mettaient au couvent… Racine lui-même ne s’en faisait pas faute… Le père, allant pleurer à chaque prise de voile, se croyait quitte envers sa sensibilité[2]. » Cela est fort spirituel ; mais d’abord deux des filles de Racine entrèrent au couvent et non pas

  1. I, p. 209.
  2. II, p. 5.