chacun une très large initiative. Aussi exercent-ils une grande séduction sur les âmes, en particulier sur les femmes et les jeunes gens. Leur esprit forme un remarquable contraste avec celui de la Compagnie de Jésus. Là, les individus sont plus effacés, évitent de se mettre en évidence : ils agissent sur les âmes par la direction privée plus que par la prédication publique ; ils trouvent leur plaisir dans le sentiment de l’immense force collective dont ils participent, à laquelle ils contribuent par leur obéissance même, plutôt que dans le libre gouvernement de leurs facultés en vue de l’intérêt divin. Enfin, comme c’est par l’accroissement de leur propre puissance qu’ils cherchent le bien spirituel des âmes, il leur arrive, à leur insu, de s’attacher au moyen plus qu’à la fin et de ne pas paraître entièrement désintéressés. Au reste, ils sont doux, polis, aimables, fins, mesurés ; aussi étroits que possible dans leur doctrine, mais indulgents pour les personnes et accommodants dans la pratique. Leur influence est plus étendue, plus secrète et plus sûre. Mais les dominicains, ces romantiques, on pourrait presque dire ces aventuriers de l’orthodoxie, ont plus de charme et d’éclat. Ils ont aussi quelque chose de plus cordial et de plus humain. Presque tous sont hommes d’imagination et d’expansive charité.
C’est pour cela que les Frères prêcheurs auront été, en effet, au XIXe siècle, les représentants les plus éminents de l’éloquence catholique en France. Une flamme si vivace embrasait les lèvres de Lacordaire que son