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selle… Croyez-le bien, mademoiselle. » C’est irrésistible, n’est-ce pas ?

Maintenant voulez-vous de la couleur ? « Debout, tout noir, les doigts crochus comme des griffes, ses yeux jaunes étincelant comme de l’or, on l’eût pris pour le génie du mal. » — « Ma vie intime est triste, sombre, humiliée ; elle est la noire chrysalide du papillon que vous connaissez. » — Voulez-vous du pathétique ? Pierre Delarue vient d’apprendre que sa fiancée l’a trahi : il s’agit de peindre sa tristesse de façon à émouvoir fortement le lecteur. Pierre se rappelle qu’un jour, quand il était aimé de Micheline, il a failli être tué dans la rue par accident : « Il pensait que, s’il était mort ce jour-là, Micheline l’aurait pleuré ; puis, comme dans un cauchemar, il lui sembla que l’hypothèse (sic) était réalisée. Il voyait l’église tendue de noir ; il percevait nettement les chants funèbres… » Et en avant le catafalque et tout l’enterrement ! (On me dispensera, après toutes ces citations que je n’ai presque pas choisies,

de m’arrêter sur le style de M. Georges Ohnet). — Voulez-vous enfin de

hautes considérations de philosophie sociale ?

Est-ce que vous trouvez mauvaise, dit le marquis, cette confraternité de M. Derblay et de Préfont ? Votre mari, ma chère amie, descendant des preux, incarne dans sa personne dix siècles de grandeur guerrière ; M. Derblay, fils d’industriels, représente un siècle unique, celui qui a produit la vapeur, le gaz et l’électricité. Et je vous avoue que, pour ma part, j’admire beaucoup le bon