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l’invraisemblance n’est que dans l’héroïsme démesuré des actes ; mais cela est du romanesque le plus légitime, sinon du plus rare.


III

Si nous passons à l’exécution, nous y voyons appliquées consciencieusement, courageusement, toutes les règles de la vieille rhétorique du roman.

Lisez le début de la Grande Marnière : « Dans un de ces charmants chemins creux de Normandie…, par une belle matinée d’été, une amazone… s’avançait au pas…, rêveuse… » Le cheval fait un écart ; un étranger apparaît qui demande son chemin. Extase et réflexions de l’étranger : cette belle personne lui paraît « vivre sous l’empire d’une habituelle tristesse… » « La destinée injuste lui avait-elle donné le malheur, à elle faite pour la joie ? Elle semblait riche : sa peine devait donc être toute morale. Arrivé à ce point de ses inductions, l’étranger se demanda si sa compagne était une jeune femme ou une jeune fille… » Voilà du moins un tour, un style, une élégance que les enfants mêmes peuvent apprécier ! On écrit comme cela à quinze ans, en seconde, quand on est un élève « fort » sans être très intelligent, et on enlève le prix de narration française !

Toutes les héroïnes sont belles et de la même façon. Des phrases se répondent d’un roman à l’autre :