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en attendant le train, de mets anglais dans une taverne anglaise au milieu de têtes d’Anglais et, estimant qu’il a vu l’Angleterre, revient chez lui.

Là il revoit sa bibliothèque française. Baudelaire est son dieu : aussi l’a-t-il fait relier en peau de truie. Il méprise Rabelais et Molière, et se soucie fort peu de Voltaire, de Rousseau, « voire même de Diderot ». Il parcourt sa bibliothèque catholique ; il a quelque sympathie pour Lacordaire, Montalembert, M. de Falloux, Veuillot, Ernest Hello, et il goûte assez le mysticisme sadique de M. Barbey d’Aurevilly.

Après un intermède pessimiste pendant lequel il dit en passant son fait à saint Vincent de Paul (car « depuis que ce vieillard était décédé, on recueillait les enfants abandonnés au lieu de les laisser doucement périr sans qu’ils s’en aperçussent »), des Esseintes revient à ses livres. Balzac et « son art trop valide » le froissent. Il n’aime plus les livres « dont les sujets délimités se relèguent dans la vie moderne ». De Flaubert, il aime la Tentation ; d’Edmond de Goncourt, la Faustin ; de Zola, la Faute de l’abbé Mouret. Poë lui plaît, et Villiers de l’Isle-Adam. Mais rien ne vaut Verlaine, ni surtout Stéphane Mallarmé ! Le théâtre, étant en dehors de la littérature, n’est pas même mentionné. En fait de musique, des Esseintes ne goûte, avec « la musique monastique du moyen âge », que Schumann et Schubert.

Cependant des Esseintes est de plus en plus malade (oh ! oui !). Il a des hallucinations de l’ouïe, de la vue