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de l’âme, les vertus familiales héritées d’une race laborieuse bien installée dans son antique et prospère probité. Elle le prendrait, écarterait de lui les influences mauvaises, lui ferait un foyer, une dignité, un bonheur, et, plus jeune que lui, elle lui serait pourtant maternelle. Elle réaliserait pour lui le rêve du poète[1] songeant aux pauvres âmes d’artistes malades :

  Il leur faut une amie à s’attendrir facile,
  Souple à leurs vains soupirs comme aux vents le roseau,
      Dont le cœur leur soit un asile
          Et les bras un berceau,

  Douce, infiniment douce, indulgente aux chimères,
  Inépuisable en soins calmants ou réchauffants,
      Soins muets comme en ont les mères,
          Car ce sont des enfants.

  Il leur faut pour témoin, dans les heures d’étude,
  Une âme qu’autour d’eux ils sentent se poser ;
      Il leur faut une solitude
          Où voltige un baiser…


Sans elle, le « petit Chose » aurait peut-être continué toute sa vie d’écrire çà et là sur des coins de table d’exquises et brèves fantaisies : elle le forcerait à travailler sans qu’il s’en aperçût et lui ferait écrire de beaux livres.

Et elle serait, sans presque y songer, sa collaboratrice : « On ne peut vivre un certain temps ensemble

  1. Sully-Prudhomme.